Trois jours de grève : pourquoi nous nous mobilisons cette semaine

Cette semaine, trois jours de grève perturbent le pays.
Certains y verront un blocage.
Nous, nous y voyons un signal : celui d’une société qui refuse de continuer comme si de rien n’était.

Ce mouvement n’est pas improvisé, ni guidé par la colère facile.
Il est le résultat d’un constat simple : le système actuel ne fonctionne plus pour la majorité, et il est temps d’ouvrir les yeux.

La fraude : visible, invisible… et souvent mal ciblée

Le débat public tourne ces derniers jours autour de “la fraude”.
On montre des images choc, des cas isolés, des exemples faciles à pointer du doigt.

Oui, il existe des abus.
Oui, certaines personnes profitent du système.
Personne ne le nie.

Mais réduire la fraude à quelques individus stigmatisés dans un reportage, c’est ignorer tout le reste de l’iceberg.

Car la fraude, ou la sous-contribution, prend bien d’autres formes :

  • les indépendants qui travaillent en cash et ne déclarent pas tout.
  • ceux qui utilisent des mécanismes fiscaux pour réduire artificiellement leur revenu imposable
  • certains professionnels très bien rémunérés qui multiplient les prestations à une vitesse qui défie l’hygiène, le bon sens… et parfois la décence.

Mais surtout, il y a cette partie du système qu’on montre rarement :
celle où les contributions faibles ne sont pas le résultat de “petits arrangements”, mais de mécanismes parfaitement légaux — et parfaitement déséquilibrés.

C’est là que le problème devient structurel.

L’injustice structurelle : quand la force économique devient un passe-droit

Une grande partie des pratiques qui affaiblissent les recettes publiques ne viennent pas d’une poignée de citoyens précarisés, mais des acteurs les plus puissants du pays : les multinationales.

Ces entreprises disposent de moyens que personne ne possède individuellement : armées de fiscalistes, équipes juridiques, structures internationales.
Et elles savent s’en servir.

Elles peuvent :

  • organiser des montages entre maison mère et filiales, déplaçant les bénéfices vers des pays où l’impôt est minimal ;
  • importer de la main-d’œuvre à bas coût, envoyée temporairement depuis des régions où les salaires sont nettement plus faibles ;
  • bénéficier d’avantages fiscaux spécifiques, parfois justifiés… parfois beaucoup moins.

Le résultat est clair :
le pays paie deux fois.

  1. Il perd des recettes fiscales, car une partie des profits disparaît à l’étranger.
  2. Il perd de la valeur sociale, car l’emploi local est parfois remplacé par des transferts temporaires moins coûteux.

Pendant ce temps, les travailleurs locaux financent les services publics à plein régime, tandis que certains géants savent comment y participer… le moins possible.

C’est cela, la véritable injustice.
Pas trois personnes en jogging dans un documentaire.

Pourquoi nous faisons grève : pour un système juste, libre et équitable

La mobilisation de cette semaine n’est pas un geste contre des individus.
Elle est un appel pour un nouveau modèle.

Nous faisons grève pour :

  • un système où chacun contribue selon ses moyens — pas selon sa capacité à contourner les règles ;
  • une société libre et équilibrée, où les réussites ne dépendent pas d’un manuel de 200 pages d’optimisation fiscale ;
  • un modèle équitable, où l’effort est partagé et où chacun participe réellement au bien commun ;
  • une meilleure réintégration des plus riches dans la société, car la réussite n’excuse pas l’isolement fiscal ;
  • une redistribution plus juste pour celles et ceux qui permettent concrètement au pays de fonctionner ;
  • une économie où l’on valorise le travail « réel », celui qui crée de la valeur humaine et sociale — pas seulement la croissance d’un capital bien placé.

Nous ne demandons pas de privilèges.
Nous demandons que les règles soient les mêmes pour tous, avec la même exigence, la même transparence, la même justice.

Ce que nous voulons construire

Au-delà des revendications immédiates, cette mobilisation porte une idée simple :
une société qui répond aux besoins de chacun, pas une société qui récompense quelques-uns sous prétexte de “mérite supérieur”.

Aujourd’hui, on vit dans un système où l’on trouve normal qu’une personne accumule dix voitures de luxe “parce qu’elle le mérite”, pendant que d’autres n’ont même pas de quoi en avoir une seule pour aller travailler.
Ce modèle n’est ni juste, ni efficace, ni durable.

Nous ne voulons pas d’un pays qui concentre les privilèges en haut de la pyramide.
Nous voulons un pays qui assure à chacun les conditions minimales pour vivre dignement : mobilité, logement, santé, éducation, sécurité économique.
Pas des cadeaux, pas des privilèges : des droits de base.

Le mérite existe, bien sûr.
Mais il ne doit plus servir d’excuse pour creuser les écarts.
Une société qui ne récompense que les plus compétitifs finit par oublier ceux qui travaillent, qui aident, qui soutiennent, qui soignent, qui éduquent — tous ceux qui “méritent” autant, mais qu’on ne voit pas sur les podiums.

Nous défendons donc une vision où :

  • la coopération passe avant la concurrence permanente ;
  • la dignité vaut davantage qu’un classement ;
  • la richesse produite bénéficie à tous, pas seulement à ceux qui savent l’accumuler ;
  • et où l’on préfère donner une voiture pour que chacun puisse avancer, plutôt que dix voitures de luxe à une seule personne qui expliquerait ensuite qu’elle “les a bien méritées”.

Ce n’est ni radical ni utopique.
C’est simplement la logique d’une société qui se tient debout, où chacun peut vivre, contribuer et progresser — sans laisser personne sur le côté.